L’article 147 de la loi Climat et résilience d’août 2021 va-t-il faire décoller la demande de crédits carbone au bénéfice des acteurs agricoles tels que l’Apad ou France Carbon Agri ? Probablement. Depuis le 1er janvier 2022, les exploitants d’aéronefs générant au moins 1000 tonnes eqCO2/an doivent compenser les émissions des vols intérieurs par l’achat de crédits carbone répondant aux exigences du label bas-carbone (LBC). L’obligation porte sur 50% des GES émis en 2022, puis 70% en 2023 et 100% en 2024. A défaut, les compagnies sont redevables d’une amende de 100 euros la tonne.
Selon le ministère de la Transition écologique, en 2020, les émissions de CO2 du transport aérien se sont élevées à 10,3 millions de tonne (Mt) en France, dont 2,9 Mt pour le transport intérieur, la desserte des Dom-Tom en générant à elle seule 1,8 Mt.
Un potentiel conséquent....
D’ici à 2024, l’aviation civile devrait donc générer une demande théorique de 2,9 Mt de carbone, voire davantage si l’on considère que le trafic aérien avait baissé de 63% en 2020 pour cause de Covid. Tout sauf un écran de fumée, au regard des projets LBC en cours. Selon le dernier décompte du ministère de la Transition écologique, les 177 projets labellisés LBC totalisent 464 300 tonnes de carbone, dont 30% pour le seul projet porté par les éleveurs fédérés par France Carbon Agri, les 70% restant étant générés par des projets de boisement et de reboisement, avec à la marge quelques programmes de plantation de nouveaux vergers. Les 2,9 Mt de l’aviation civile constituent un appel d’air bienvenu pour les porteurs de projets agricoles, en attente d’un véritable décollage de la demande.
... mais des conditions partiellement limitantes
Cependant, le gisement final ne sera peut-être pas aussi conséquent. Tout d’abord parce qu’en vertu d’un autre article de la loi Climat (le 145) sont interdits, depuis le 28 mars dernier, les vols intérieurs pour lesquels le train assure, sans correspondance et plusieurs par jour, le même trajet en moins de 2h30. Ensuite parce que les compagnies ne sont pas tenues de faire leur marché exclusivement en France, ni même en Europe. Selon des décrets et arrêtés parus le 26 avril dernier, le quota de projets de compensation carbone intra-européens est fixé à un minimum de 20% des émissions de GES pour 2022. Il sera de 35% en 2023 et de 50% minimum en 2024.
Gageons que les compagnies opérant en France feront leur marché en France, ce qui aboutirait à un potentiel théorique de 2,9 Mt sur la base des émissions de 2020.
S’agissant du prix, l’arrêté du 26 avril dernier inscrit dans le marbre le prix plafond de 40 €/t. En effet, si les compagnies ne trouvent pas de carbone à ce prix sur le sol européen, elles seront dispensées des quotas de 20%, 35% et 50% évoqués précédemment et feront leurs emplettes sur le marché international, où le prix de la tonne de carbone est moindre.
Source : un article de Raphaël Lecocq / www.pleinchamp.com.